ven. 9 février 20h30 | |||||
Gawa | ||
© Natasha Flandin | Gawa, mot de berbère ancien qui signifie agelid, (roi), a été opportunément utilisé par le chanteur Salah Gaoua, pour désigner son groupe. Accompagné de quatre musiciens, le groupe mêle chants et rythmes issus de différentes régions dAlgérie - rythmes traditionnels berbères (chaabi, aïssawa, gnawa) notamment - à des emprunts amicaux faits à la chanson française, en particulier Michèle Bernard et Renaud. Salah Gaoua fait aussi des incursions dans le monde du théâtre : collaborant lan dernier avec le Théâtre du Grabuge dans Le Cri dAntigone, il interprétait le double de lhéroïne, chantant la révolte de celle-ci.
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Rencontre avec Salah Gaouah | ||||
CMTRA (Centre des Musiques Traditionnelles Rhône-Alpes) : Vous rapprochez les esthétiques en combinant musique traditionnelle et variété française
SG (Salah Gaouah) : Nous interprétons Hexagone de Renaud et Je taime de Michèle Bernard. Je taime incarne lamour du XXIème siècle, jai été envoûté par linterprétation quen donne Michèle Bernard. Je me suis permis den faire un arrangement en ajoutant un couplet en kabyle, tout en respectant lesprit de la chanson. La chanson de Renaud interpelle un pays en train de se détourner de ses idéaux. Jai été touché par son talent de chanteur, dartiste, dhomme. Nous avons rebaptisé ce chant Illusions, pour dire que sil y a encore un combat à mener aujourdhui, cest contre lislamisme que - après le fascisme noir et le fascisme rouge - je qualifie de fascisme vert. Je parle aussi de lAlgérie meurtrie. En tant quAlgérien, aujourdhui, je suis coincé entre les casquettes et les barbes (les militaires et les islamistes), ce sont les deux mâchoires dune tenaille. Je suis natif de la Kabylie et imprégné dune culture musicale qui a marqué cette région, avec notamment Idir et Matoub dans les années 80. Ma rencontre avec Atmane, dAlger, le berceau du châabi (musique populaire algérienne), et avec Ali, natif de Mostaganem dans lOuest, avec la tradition du aïssawa (chants sacrés), a fait que nous avons mélangé les styles. Nous avons voulu donner un cachet douverture à dautres horizons musicaux, dont nous sommes bercés chaque jour en France. M. Mammeri, anthropologue et écrivain, disait si le ghetto sécurise, certes, il stérilise aussi. Je pense que la meilleure façon de tuer une culture est de la confiner. (
) | CMTRA : Aujourdhui tu naimes pas trop lexpression dartiste engagé
SG : Je trouve que cest trop à la mode, et pour moi, un chanteur qui chante des chansons damour est aussi un artiste engagé. Je préfère parler de chanson qui interpelle, les pouvoirs politiques ou les consciences individuelles. Je pense en mon nom, je ne représente pas une communauté, je naime pas ce terme. Nous allons commémorer bientôt le Printemps Noir, plusieurs centaines de morts et des blessés qui se comptent par milliers. Je nai pas besoin dintégrer un parti politique pour parler et chanter les problèmes de la Kabylie depuis deux ans, parce que cest ma région, il sagit de mes proches, mes amis (
) CMTRA : Où en sommes-nous du sentiment détrangeté et de familiarité entre Français de souche (ces mots sont définitivement détestables) et Français dorigine algérienne? SG : En dehors des relations détat à état, les deux peuples sont liés, incontestablement. Le premier pays francophone, après la France, cest lAlgérie. Et la première langue parlée en France, après le français, cest le berbère (Tifinagh*). Pour ma part, je suis lié damitié et damour avec mes amis français. Je crois à lexistence de cette relation, et je ne pense pas à lavenir du bassin méditerranéen sans un rapprochement des deux peuples. Propos recueillis par V.P.
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chant Salah Gaoua / basse, mendol Atmane Yahi / ney, chant Ali Bensadoun / mandoline, piano Thibault Chevalier / guembri, luth, guitare, percussions Zinou / batterie Florian Triby / basse François Biderman / distribution en cours | ||