Au travers du cas Gaspar Meyer, Jean-Yves Picq invoque aussi lasphyxie de limaginaire et la disparition des cultures et des langues qui le nourrissent. Fabriqué, manipulé, imposé, le réel fondé sur la terreur économique détruit la conscience du temps et de lhistoire au profit de lintérêt immédiat. La réalité devient virtuelle comme la manipulation de largent efface la conscience de largent. Elle ne laisse aucune alternative et mène à la folie meurtrière en effaçant la conscience du meurtre et de la folie. Cest ici lenfance qui est niée, parce quelle prend du temps et que ce temps nest pas rentable. A travers lexemple de lenfance volée de Gaspard, se profile la négation de lenfance de tous les possibles du monde. Gaspard Meyer, fils retranché sur un court de tennis, face à linacceptable, ne trouve dautre espace de dialogue quavec les fantômes des victimes anonymes de son père. Une vieille indienne, sortie du fond des âges, spectre rescapé de peuples anéantis, incarne le chemin de lhumanité en voie de disparition. Au jeune homme, dont elle inspirera lacte publique de sa révolte, comme les oracles des temps anciens, elle délivre un double message. Une condamnation tout dabord : "
vous avez fait de cette terre, qui devait nourrir lhomme et lui permettre de vivre ce rêve éveillé quest la vie, vous en avez fait un lieu de souffrance et de famine, un lieu de calcul et de honte. " Suivie dune proclamation : " A la question : quest-ce que la vie, la réponse, depuis la nuit des temps, est toujours la même. Cest léclat dune luciole dans la nuit. Cest le souffle dun chien en hiver. Cest une ombre qui court dans lherbe et se perd au couchant. " Et cest non sans humour, que Jean-Yves Picq qualifie sa pièce de " fable poétique sur léconomie ". | | |