lettres de prison...
A tout instant je suis à mon poste et, dès que la possibilité m’en sera offerte, je m’empresserai de taper de mes dix doigts sur le clavier du piano du monde, que ça fera un beau vacarme ! Mais comme, non par ma faute, mais par contrainte externe, j’ai été "mise en congé" d’histoire mondiale, je ris un bon coup, je suis heureuse quand ça marche même sans moi, et je crois dur comme fer que tout se passera bien. Je suis d’avis que l’on doit tout simplement, sans vouloir être trop maligne ni se casser la tête, mener la vie que l’on tient pour juste, sans exiger d’être payée sur l’instant en espèces sonnantes pour tout ce qu’on fait.

Lettre de Rosa Luxemburg à Sonia
Liebknecht / Wronke, le 2 mai 1917

Ma chère Tilde,
Je tiens à répondre sur le champ à ta lettre de Noël, tant que m’agite la colère neuve qu’elle a fait naître en moi. Oui, ta lettre m’a mise en rage, parce que, si brève soit-elle, chaque ligne y révèle combien tu es retombée sous l’emprise de ton milieu. Pour moi, sans avoir jamais été particulièrement tendre, je suis, ces derniers temps, devenue dure comme de l’acier poli. Désormais, ni en politique, ni pour le choix de mes amis, je ne ferai plus la moindre concession.

Lettre à Mathilde Wurm
Wronke, le 28 décembre 1916